Originellement, La marche circulaire du Baguazhang est une pratique sur l’énergie du Ciel Antérieur, l’énergie prénatale. L’acte simple d’une marche circulaire crée un vortex qui permet au pratiquant d’amplifier, relier et accompagner les forces naturelles qui s’élèvent spontanément depuis la Terre et descendent depuis ce que la Tradition taoïste nomme le Ciel.
Approfondir les mouvements de torsion du Bagua Neigong permettent d’atteindre les dynamiques les plus raffinées de l’être humain: à travers elles, la réalisation dynamique de spirales stimule le Qi et le Corps. Avec le temps, vous pouvez directement apprécier l’existence d’un vortex qui spirale à l’intérieur de votre corps, se déplaçant simultanément vers le Ciel et vers la Terre. Ce mouvement fondamental met à jour un mystère profond lié à la condition humaine.
– Bruce Frantzis
En cette période hivernale, il est plus facile de s’approfondir, de rentrer en soi, dans ses tréfonds, et ainsi de parcourir l’essence à la recherche d’un espace silencieux et intime, muet, à la frontière de choses conscientes.
C’est cette fraicheur de l’hiver, cette immobilité apparente qui confère aussi à l’immanence, au présent pulsant dans la moelle des os.
Après l’exploration du jīběngōng 基本功 (pratique fondamentale), je commence la marche circulaire, mais je ne me réfère pas uniquement à un dìngshì 定式, un ensemble de formes fixes, mais aussi laisse faire le Qi en suivant les évolutions du Ciel et de la Terre.
Dans la morsure plus ou moins légère du froid, je rythme le sens du sang et je vois shàoyīn 少陰 se révéler, la chaleur du sang se répandant comme un flux, permettant à ma conscience un retour sur l’identité dynamique de mon corps. Dans ces moments essentiels, le rythme, le changement, les torsions, la courbe créent une symphonie qui parle de ce que je suis à l’origine, d’où je vais, de mes variations propres. Il semble que j’ouvre un livre s’exprimant à travers la forme d’une éternité.
Au début il y a beaucoup de moi, l’être mémoriel, identitaire, mais au fur et à mesure que je marche, s’ouvrent des dimensions plus essentielles, plus premières, qui me revigorent et me font le plaisir de leur présence fondamentale.

Ces changements de sens créent des espaces identiques au « vide » de l’intermède entre inspir et expir. Un vide indéfinissable.
Dans ces sens, je ressens la forme spiralée de la torsion, une forme originelle du corps s’ouvrant au Ciel et à la Terre, du corps s’ordonnant au centre de la définition la plus simple du qi: le changement entre Yin et Yang.

Comment alors ne pas se sentir à sa place, quand le simple fait de goûter au mouvement crée la place elle-même? Quand on se rend compte par l’acte que le simple fait de vivre et de bouger est une définition suffisante à toute chose, qui permet de se réintégrer soi dans un ordre naturel omniprésent?
C’est dans ces moments que je prends toute la mesure du Qìgōng 氣功 et du Nèigōng 内功, au delà de leurs propriétés premières d’entretien du Yǎngshēng 养生. Je goûte à la mesure de cette méditation profonde sur la nature même de quelque identité fondamentale à ma vie: un vortex vibrant au cœur du mouvement, un vortex fait de vide.

Cette sensation me mène à des considérations sur l’état général de la matière et de sa structure, considérations qui me sensibilisent depuis quelques années aux travaux de Nassim Haramein, physicien de génie, sur la Structure en Double Tore de l’Univers dégagée du Taijitu et sur la réalité du passage de l’information et du Vide. Son discours peut que plaire à tout pratiquant sensible au Qigong. Quelques aperçus:
Haramein renverse l’axiome de la géométrie classique et déclare que “la seule chose qui existe est le point”. Les systèmes finis et infinis sont en réalité complémentaires. On peut donc avoir une quantité infinie de divisions et d’informations dans les limites d’un espace fini. C’est le cas pour notre corps. Il postule, sans le démontrer, qu’on a bien une limite physique mais que l’on peut la décomposer sans limite (cellule, atome, proton/neutron, quark…). Il s’agit donc d’un monde fractal se répétant sans cesse sans discontinuité.
Haramein observe que la seule chose qui relie le tout, est l’espace. Il est présent entre les galaxies, les planètes nos cellules, nos atomes… La structure atomique est constituée de 99,99999…% d’espace. Tout ce qu’on pense être un monde “matériel” est en fait, constitué essentiellement de vide à 0,0000001%. Il propose donc de s’intéresser plutôt à la partie “vide” qu’à la partie dite “physique”. Peut-être que les objets ne définissent pas l’espace mais que l’espace défini les objets. Ainsi, il pense que l’espace ne peut être vide.
La fluctuation du vide serait en fait, un composant de la structure qui produit notre réalité. Il y a un échange constant entre la structure du vide et l’ensemble de la structure atomique de l’univers. Nous échangeons constamment des informations et cet échange peut se faire par l’intermédiaire des électrons, s’échangeant à travers le vide avec un positron toutes les millisecondes à la vitesse de la lumière. Les transfert d’informations surviennent à tous les niveaux, qu’on se situe à la taille de l’univers ou à la longueur de Planck (la plus petite chose de l’univers : 1,616×10-33 cm).
Cet échange d’information, relayé par le vide pourrait être l’agent organisateur qui produit la complexité et l’organisation de notre monde, même au niveau biologique. Cela pourrait même expliquer l’origine de la conscience. Le vide n’est donc finalement pas vide dans le sens usuel du terme mais plein d’énergie, une énergie qui connecte absolument tout. Tout est Un.
Le vide a une structure, et l’énergie du vide, dont l’équivalent-masse du volume d’un proton est exactement celui de la masse de l’Univers, assure la cohésion de l’Univers.
Haramein propose aussi un nouveau modèle pour le structure de l’espace-temps en intégrant le couple et l’effet Coriolis. Au lieu d’une surface lisse et sphérique, il propose le tore en double structure pour représenter le trou noir. Ainsi pour chaque rotation il y a une contre-rotation. Haramein applique son modèle pour expliquer le fonctionnement des trous noirs dans les galaxies. Les trous noirs sont au centre de toutes les galaxies. mais seraient, selon sa théorie, antérieurs aux galaxies. Les trous noirs seraient en fait un modèle fondamental du vide lui-même et cela produit la matière. Ils n’absorbent pas seulement les informations mais diffusent également les informations. Il signale d’ailleurs que notre univers obéit premièrement à la condition d’un trou noir.
En d’autres termes, Nassim Haramein souligne un postulat déjà bien entendu en holistique chinoise et dans le Qigong: Yin a la préséance et Yang la préférence, le Vide est une condition essentielle à la Forme..
La marche circulaire du Baguazhang qui mènerait par la pratique à une sensation intime de ce double tore ? Serais-je en plein hallucination? Ou bien suis-je tout simplement par la pratique en phase avec des lois naturelles omniprésentes et sensibles, des lois qui parlent quotidiennement du monde?
Les théories de Nassim Haramein restent à l’heure actuelle des postulats, et sont en cours de vérification: en tout cas, l’idée d’un monde uni, pouvant se questionner par le sensible enchante mon cœur d’être vivant.
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Sources:
https://cho-ku-rei.fr/la-theorie-des-champs-unifies-de-nassim-haramein/
Explication de la double tore par Nassim Haramein:
https://youtu.be/TaXLWyI7QGI
Explication de la représentation de l’univers fractal-holographique:
https://youtu.be/vUp-cth5754